Le pitch

La guerre est désormais menée par les robots et le seul territoire sur lequel ils ne sont pas admis est le territoire des Etats-Unis, à cause d'une loi qui les interdit. Raymond Sellars, dirigeant de l'OmniCorp, veut étendre la présence des machines aux USA et pour cela il compte sur un coup de pub afin de faire pencher le vote sur l'abrogation de cette loi en sa faveur : mettre un homme dans la machine. Le candidat idéal se présentera à lui sous l'identité d'Alex Murphy.

La critique

Voilà ! Faire un bon remake, c'est possible ! Comment ? En ne cherchant pas à imiter le modèle à tous les niveaux. Certains éléments du film d'origine sont repris, tels que les flashs infos, mais sinon, cette nouvelle version a sa propre histoire et sa propre dynamique. Si je garde, et je pense que beaucoup me rejoindront, ma préférence à l'original, j'ai beaucoup aimé la version 2014, outre quelques défauts.

Quelles étaient mes craintes ? D'abord, la présence de la famille de Murphy. J'avais peur qu'un surplus de pathos ne casse le rythme. Ensuite, j'avais peur de l'effet Total Recall, c'est-à-dire un remake pour les effets spéciaux : sans âme. Sur ces deux points, soulagement. Lewis devient ici un homme, ce qui se justifie de deux façons : d’abord, dans le premier film, si elle était une femme, elle n’était pas traité comme tel, ensuite la femme de Murphy étant très présente, ça ne gêne pas, et ça évite une connerie genre jalousie, triangle amoureux ou autres qui eussent été ridicules. Cela dit, Robocop, encore amoureux de sa femme, niveau sexuel, soit il a une bite en titane, auquel cas madame pourra s’amuser, soit il n’a pas eu cette option sur l’armure, et madame va s’ennuyer. Dans tous les cas, monsieur n’aura plus jamais d’orgasme. En fait son couple est foutu. Par contre le fils sera content, « Fuck you, my daddy is RoboCop ! ». Je ne sais pas si pour le gamin ce serait génial ou traumatisant. Verhoeven a eu raison de ne pas faire apparaître la famille. C’est un vrai bordel à gérer.

My husband is fucking Robocop !
I totaly can handle her

Sinon, la relation entre Robocop et sa femme n'est pas exagérée. Elle sert à amener l'homme à reprendre le pas sur la machine sans pour autant qu'il y ait d'effusion de pathos. Ensuite, là où Total Recall n'était qu'une redite du film d'origine très affadie, ce nouveau RoboCop est un autre film, qui a l'avantage d'avoir les scénaristes d'origine, Edward Neumeier et Michael Miner. On sent l'amour qu'il y a pour le film de Verhoeven, et le réalisateur voulait juste explorer le personnage d'une autre façon qui fonctionne très bien. Je reprocherais certes que le passage de l'homme à la machine sans âme est un peu long, bien que le processus soit présenté de façon intéressante. En effet, il perd son humanité par étapes : d’abord il perd son corps, ensuite son libre arbitre, et enfin ses émotions. Et à chaque fois il doit gérer cette perte. Il arrive, difficilement, à accepter la perte de son corps physique, mais le reste lui cause des crises car en tant qu’être pensant et ressentant, c’est un sentiment insupportable. Cette humanité perdue, il devra la regagner pendant le reste du film. Et s’il ne peut récupérer son corps, au moins peut-il en choisir l’apparence. La quête de soi, déjà présente dans le premier film, est abordée donc sous un autre angle, par le choix de montrer une déshumanisation plus progressive. Le chef de l’OCP n’est pas plus scrupuleux que Dick Jones ou que Bob Morton pour autant, car c’est le scientifique qui tente de lui laisser autant d’humanité que possible et ce n’est que contraint qu’il la lui retire.

La figure du scientifique, incarné par Gary Oldman, est assez classique : il veut que son travail soit fait pour la paix mais le voit détourné pour la guerre. Il me rappelle surtout Otacon, de la saga Metal Gear Solid, à laquelle la séquence d’ouverture du film, à Téhéran, fait référence (au quatrième volet). Quant au patron de l’OCP, ici incarné par Michael Keaton, il est traité comme un véritable commercial. Il se fiche de l’humanité de Murphy, pour lui, ce n’est qu’un moyen de faire tomber la loi anti-robot. Il ne voit le robocop que comme un produit destiné a réalisé des profits. Mais en même temps le film le montre comme un type normal et n’exagère pas ses traits. C’est un patron d’entreprise standard, et c’est pour cela que cela fonctionne. Ce qui est dommage, c’est qu’il demande l’autorisation à la femme de Murphy pour en faire un cyborg. Le déclarer mort lui aurait permis d’en avoir rien à foutre. Comme dans l’original « il est légalement mort, on peut en faire ce qu’on veut. Virez le bras ». Il est quand même prêt à le tuer à le fait, pour un coup de pub en sa faveur. Ce personnage ne pense vraiment qu'en commercial. Enfin, le personnage de Pat Novak et ses JT. Là on a un type détestable et risible, l’archétype du journaliste de propagande qui empêche l’opposition de parler en coupant sa communication, avant de critiquer ceux qui font exactement la même chose dans le camp opposé (mais que l’on ne voit pas).

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Les thèmes sont ceux du film de 1987, réactualisé à notre époque, et prenant en considération les technologies modernes. Donc forcément, Robocop n'a plus le même design, et on s'en fou s'il a une main non-robotique. Une scène, un plan même montre ce qui reste de Murphy physiquement. C'est assez glauque, et je pense que c'est pas mal de montrer cela. Surtout que pour du large public, je ne m'y attendais pas. Cela crée une fascination morbide pour le personnage. Le fait qu'il soit traité comme un simple produit est également bien mis en scène. La question est "comment le vendre ?". La manipulation des médias est toujours un sujet du film, et les armes remplacent la drogue.

Je remarquerai ensuite les clins d'oeil au film de Verhoeven: la présence de l'ED-209, la réplique "I wouldn't buy that for a dollar" et une autre réplique "Dead or alive, you're coming with me" parmi les références, bien placées et pas lourdes. Enfin, le thème musical composé par le grand Basil Poledouris est réutilité, avec parcimonie. C’est assez plaisant de le réentendre. Le reste de la BO est sympathique, quoique parfois surprenante... J’ignorais que le yodle était une musique d’action. Fallait y penser.

Cela dit, si le film fonctionne, je continue de préférer très largement celui de Verhoeven pour son style plus cynique et viscéral (et violent). La mort de Murphy est moins violente d'une certaine façon, car ce n'est pas une bande de sadique qui se marre en l'explosant à coup de fusil à pompe. Il n'y a là qu'une explosion. L’OCP a plus de scrupule à conserver l’humanité de Murphy, mais en même temps c’est pour plaire qu’ils veulent faire ça, et donc pour gagner plus d’argent. Ce nouveau film possède moins de moment culte et à certains niveaux est moins subtil, plus poli, plus gentil. On sent la main mise des producteurs. Je ne suis pas non plus fan du traitement de la famille, même si ça passe, j’aurais préféré qu’elle ne soit pas montrée. Enfin, les deux films restent très différents. Ce sont deux approches différentes du même sujet et la force de ce remake est de ne pas à imiter de trop près son modèle. Nouveau design, nouveau scénario, mais même sujet. Il a compris son modèle et en a tiré quelque chose de neuf, et d'intéressant. Voilà comment faire un bon remake. Il ne l'égale pas mais sait être un film plaisant à voir.

 

Titre original
Robocop

Réalisateur
José Padilha

Scénaristes
Michael Miner
Edward Neumeier

Casting

Alex Murphy/Robocop - Joel Kinnaman

Dr. Norton - Gary Oldman

Pat Novak - Samuel L. Jackson

Raymond Sellars - Michael Keaton

Clara Murphy - Abbie Cornish

 

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